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MONTESQUIEU

L'Art de vivre

L'art de vivre consiste dans une recherche méthodique du bonheur: «Il ne faut point beaucoup de philosophie pour être heureux; il n'y a qu'à prendre des idées un peu saines.»

 

Proscrire les passions

La raison veille à ne pas laisser l'âme sous la dépendance des passions qui la rendraient malheureuse. Il est agréable d'aimer, mais non d'être enchaîné par l'amour: « J'ai été dans ma jeunesse assez heureux pour m'attacher à des femmes que j'ai cru qui m'aimaient. Dès que j'ai cessé de le croire, je m'en suis détaché soudain.» Il est agréable d'avoir de grands desseins, mais non pas de se laisser tourmenter par l'ambition: « J'ai l'ambition qu'il faut pour me faire prendre part aux choses de cette vie; je n'ai point celle qui pourrait me faire trouver du dégoût dans le poste où la nature m'a mis.» Il est agréable de s'intéresser aux biens de la fortune, mais non pas de subir leur tyrannie: l'argent est un "bon esclave", mais un "méchant maître".

 

Accepter le destin

La raison dispose l'âme à tirer le meilleur parti possible de la situation qui lui est faite: «Cherchons à nous accommoder de cette vie; ce n'est point à cette vie à s'accommoder à nous.»
«Je suis presque aussi content avec des sots qu'avec des gens d'esprit.»
«Quand je devins aveugle, je compris d'abord que je saurais être aveugle.»
«Je n'ai plus que deux affaires: l'une, de savoir être malade; l'autre, de savoir mourir.»

 

Cultiver les plaisirs

La raison enseigne enfin à retirer de la vie le plus grand nombre possible de jouissances. Il y a m agrément dans le seul sentiment d'exister: «Je m'éveille le matin avec une joie secrète; je vois la lumière avec une sorte de ravissement. Tout le reste du jour, je suis content.» Il y a des satisfactions sociales, fierté de posséder un titre, agrément des conversations mondaines, plaisirs moins frivoles de l'amitié; on doit les multiplier et les varier: « Quand on n'a pas d'appétit, il faut quitter la table et aller à la chasse.» Les joies les plus hautes enfin sont celles que se donne l'esprit dans la solitude et le recueillement: «L'étude a été pour moi le souverain remède contre les dégoûts de la vie, n'ayant jamais eu de chagrin qu'une heure de lecture m'ait ôté.»

 

Proscrire les préjugés

La raison affranchit l'âme des préjugés qui lui masquent la vérité: il en est de tout ordres. Les disputes littéraires sont des querelles de préjugés; le sage en tire enseignement sans prendre parti: «J'aime à voir les querelles des Anciens et des Modernes; cela me fait voir qu'il y a de bons ouvrages parmi les Anciens et les Modernes.»

 

L'art d'écrire

L'art d'écrire, enfin, consiste dans une recherche méthodique de l'effet. Souveraine également dans ce domaine, la raison enseigne à se défier du premier jet, car il faut veiller « à écrire avec ordre, à raisonner juste et à bien former ses raisonnements» : ainsi, le style est la discipline de l'inspiration. Il y a lieu aussi de rehausser la pensée grâce aux prestiges de la rhétorique: Montesqieu cherchait à doser savamment l'ironie, l'humour; et, d'une façon générale, à «mettre du sel» sans ses ouvrages. De tous les «philosophes», il était ainsi, peut-être, le plus consciemment artiste.

 

 

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