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LE MOUVEMENT COMMUNISTE
Jean Barrot


Deuxième partie : Le Mouvement Communiste

Le mouvement communiste s'affirme et se manifeste à deux niveaux. D'une part, il groupe ceux qui luttent pour le communisme et contribuent à son apparition au grand jour. Mais cette action et ce regroupement seraient impossibles si parallèlement le mouvement n'existait en profondeur, dans les entrailles de la société capitaliste, au sein du mode de production capitaliste. Le mouvement communiste est avant tout un mouvement objectif, c'est-à-dire qu'il n'est pas le produit de la volonté, d'une action consciente, et trouve au contraire son fondement dans des rapports économiques et sociaux bien déterminés. Naturellement, il est totalement faux de séparer ces rapports de l'activité humaine consciente qui s'appuie sur eux [1]. Cependant, il a été nécessaire de faire provisoirement abstraction de cette activité et d'isoler d'abord le noyau objectif qui seul permet de comprendre le reste : la définition du capital. C'est parce que le capitalisme, dans son être le plus essentiel, est une structure contradictoire et crée les conditions de possibilité et de nécessité d'un autre système social, qu'il suscite malgré lui l'apparition et l'organisation d'hommes luttant contre lui pour instaurer ce mode de production « supérieur », comme dit Marx, le communisme. Le mouvement communiste est à la fois l'action des forces productives développées par le capital en lutte contre les rapports de production capitalistes, et l'action humaine qui tente de faire triompher cette lutte [2]. Plus exactement, il constitue l'unité indissociable de ces deux processus. Toute tentative de le réduire à l'un ou l'autre de ses deux composants équivaut à le nier.

Comme le processus de travail, le mouvement communiste peut se décomposer en facteurs « objectifs » ( contradictions dans le mécanisme économique et social ) et facteurs « subjectifs » ( les hommes qui dans certaines circonstances luttent -- la plupart du temps sans le savoir -- pour le communisme ). Plus exactement, leur lutte eux-mêmes, pour leur existence menacée par le capital ( 
cf. les sans-réserves dans « Le Prolétariat, rapport social » ) prend une signification et joue un rôle qui les dépassent. A ce stade, les représentations et formes de la conscience nées de l'ancienne société, avant cette rupture de l'équilibre social, sont bouleversées. Le prolétariat est contraint non seulement d'être révolutionnaire, mais aussi de devenir conscient de ce qu'il fait. Les communistes, produit de la subversion de la société, peuvent accélérer le processus révolutionnaire, si leur action -- théorique et pratique -- exprime, par le texte ou par le geste, le sens de ce qui se passe [3]
.



[1] « Éléments d'orientation », Invariance, no. 9.

[2] On peut illustrer ce processus par l'étude des luttes ouvrières, qui contredisent presque toujours, par ce qu'elles expriment de profond sur le mouvement de la société, les commentaires de ceux qui les analysent : cf. Entre autres Les conflits sociaux en Europe, Verviers, 1971.

[3] Engels, « Les Communistes et Karl Heinzen », cité dans Marx, Textes (1842-1847), Spartacus, 1970, p. 33.



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