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Un Monde Sans Argent : Le Communisme
VIII. Proletariat et Communisme



BOURGEOIS ET PROLÉTAIRES

Qu'est-ce que le prolétariat ? Où commence-t-il et où s'arrête-t-il ? Quelle est son importance numérique ?

Sur l'importance numérique de la classe ouvrière au sens strict des évaluations à partir des statistiques officielles ont été faites. Elle représente une faible partie de la population mondiale puisque l'on peut situer sa taille entre 200 et 250 millions d'individus. Evidemment ce chiffre n'est pas celui de l'ensemble des prolétaires dans la mesure où il exclut les familles de ces ouvriers et où bon nombre de salariés prolétarisés, même de l'industrie, ne sont pas comptés. De toute façon l'importance numérique de la classe ouvriers qui est déjà énorme si on la compare à celle de la bourgeoisie ne suffit pas à rendre compte de son importance réelle.

Ajoutons que cette importance, contrairement à la thèse qu'essaient d'accréditer les sociologues d'avant-garde, est croissante.

Mais pas plus que la bourgeoisie le prolétariat n'est une chose que l'on pourrait toucher, délimiter et chiffrer avec précision. Cela n'enlève rien à sa réalité même si les sociologues n'arrivent pas à la saisir dans leur filet universitaire.

On né peut réduire le prolétariat à quelque image standardisé : le miséreux en haillons, le travailleur en bleu de chauffe, le porteur de drapeau rouge. Ce n'est que dans des situations précises que ses limites apparaissent clairement.

De même que l'on définit la bourgeoisie comme une caste, par ses privilèges et ses tics, par sa difficulté d'accès au lieu de la définir comme une classe, par sa fonction dans les rapports de production, de même l'on réduit le prolétariat à une catégorie socio-professionnelle ou à une addition de catégories socio-professionnelles.

A partir de là il est aisé de montrer qu'il est difficile sinon impossible dé saisir ce qu'est le prolétariat. A-t-il vraiment une existence ? Les progrès de la technique et la sécurité sociale ne l'ont-ils pas fait disparaître ? La lutte des classes si on consent à lui accorder quelque importance est ramenée à une forme de conflit parmi d'autres. Les femmes et les hommes, les jeunes et les vieux, les citadins et les campagnards se disputent parfois. Pourquoi n'en serait-il pas de même entre ouvriers et patrons ?

Nos sociologues reprochent à Marx, lui qui a inventé la lutte de classes, de ne pas savoir ce qu'est une classe sociale. Il se contredit, parfois parle de la paysannerie comme une classe et parfois la divise en classes opposées.

Que les paysans puissent tantôt être considérés comme une classe unique parce qu'ils ont des intérêts et des illusions communes, parce qu'ils agissent dans le même sens, puis que ces mêmes paysans puissent être divisés en pauvres et en riches, en fermiers et en propriétaires fonciers, voilà qui dépasse l'entendement d'un sociologue. Il ne peut savoir qu'une classe ne se définit pas, du point de vue intellectuel comme du point de vue pratique, indépendamment de l'activité par laquelle elle ne constitue en classe. Il n'y a pas de classes indépendamment de la lutte de classes.

Ramener une classe à une catégorie socio-professionnelle c'est se donner l'illusion de la science et de la rigueur. En fait tout dépend des critères plus ou moins arbitraires que l'on choisit pour découper le corps social. Surtout c'est chosifier la réalité.

Tout est ramené à la place que le capital assigne aux hommes. On photographie un certain découpage : les intellectuels, les ouvriers, les habitants des bidonvilles, les smicards. On ne voit ni ce qui engendre ces situations, ni la possibilité de leur dépassement.

Au mieux les "classes" restant les classes, on imagine que l'une l'emporté sur l'autre. Ainsi en occident la bourgeoisie domine tandis que dans les pays de l'est le prolétariat a instauré sa dictature.

Pour nous le prolétariat ne peut pas être défini indépendamment de sa lutte contre le capital, c'est-à-dire aussi indépendamment du communisme.

Cela ne veut pas dire qu'une classe est l'ensemble des gens qui luttent pour une même cause. Dans ce cas le bourgeois qui sympathiserait avec la l'évolution se transformerait en prolétaire et le balayeur réactionnaire se retrouverait banquier. L'anti-capitalisme, c'est-à-dire le communisme, peut devenir une cause pour certains mais par sa nature il n'est pas une cause. Il est une activité liée à une situation sociale particulière.

Le prolétariat est cette fraction de la population qui produit le capital tout en étant séparé de sa possession et de sa gestion. Le cauchemar autogestionnaire c'est de faire accomplir aux prolétaires la fonction du bourgeois. Cette chimère se réaliserait-elle qu'il n'y aurait pas pour autant abolition des classes. La bourgeoisie et le prolétariat coexisteraient contradictoirement dans un ensemble unique. Le même sur sa machine serait l'ennemi du même au conseil d'administration.

Il arrive de temps en temps que des enfants de bourgeois aillent se ruiner la santé à l'usine et que des ouvriers fassent fructifier leur avoir sur le dos de quelques malchanceux. Il n'y a rien là-dedans qui signifie une abolition des classes.

La ligne de démarcation entre gestionnaires et esclaves du capital est stricte. Il se trouve simplement que certains ont un pied d'un côté de la frontière et l'autre pied de l'autre côté. Il leur faudra bien basculer d'un côté ou de l'autre.

Faut-il concrétiser la ligne de démarcation ? On peut la saisir dans l'attitude à l'égard de l'argent. Bien sûr, bourgeois et prolétaires se distinguent par la quantité d'argent qui leur passe entre les doigts. Mais cela ne suffit pas. Plus fondamentalement, le prolétaire voit dans l'argent l'argent. Pour lui ça représente un certain nombre de biens. Pour le bourgeois l'argent c'est le capital-argent. L'argent sert à faire plus d'argent. On l'investit et, oh merveille, ça fait des petite. Voilà ce qui lie, à travers les âges, le bourgeois moyen-ageux et le manager moderne. Aujourd'hui il y a en plus l'hypocrisie.

Pour cerner la classe bourgeoise il faut y ajouter les liens familiaux et les pesanteurs sociologiques qui font des enfants ou des femmes de bourgeois des membres de la bourgeoisie.

Dans la vie économique et au sein des entreprises la frontière passe entre ceux qui ont accès aux connaissances et aux décisions financières, pas forcément les techniciens et employée de la finance, et les autres. Il y a ceux qui savent qu'une entreprise c'est de l'argent momentanément immobilisé destiné à faire de l'argent. Il y a ceux, la grande masse, qui y voient d'abord une fabrique et un commerce de valeurs d'usage.

Rattacher un individu à une classe donnée est parfois difficile. Tel cadre supérieur, tel ingénieur et pourquoi pas tel ouvrier peut par ses origines familiales, ses possibilités de promotion, ses amitiés, ses fonctions de commandement, ses possessions ou ses propriétés être capté par la classe dirigeante. Au contraire, des petits spéculateurs se rattachent par mille liens à la classe dominée.

Du point de vue de la révolution il importe de ne pas rejeter au départ dans le camp bourgeois les prolétaires de luxe. L'ingénieur rattaché à la bourgeoisie et à plus forte raison ses collègues qui n'ont ni son salaire, ni son rôle dirigeant, ni ses relations, peuvent ressentir la contradiction entre leurs intérêts professionnels et humains et les limites qu'impose la finance. Cela peut les faire basculer vers le communisme, vers un monde où les projets techniques échappent à la dictature de la valeur d'échange.

Leur savoir et leurs compétences sont nécessaires. Attention cependant à ceux qui peuvent loucher du côté de la révolution parce qu'ils voient leur condition se prolétariser et qu'ils espèrent naïvement se refaire une autorité.

En période normale et notamment en dehors du procès de production la situation peut paraître floue. La société semble composée de particules individuelles qui divaguent dans une direction ou dans sine autre. L'ouvrier et le bourgeois semblent disparaître pour n'être plus que des électeurs égaux ou des consommateurs plus ou moins riches. Dès qu'un conflit éclate, que la révolution apparaît, les particules se rassemblent autour de pôles antagonistes.

Le prolétariat n'est pas une masse indifférenciée. Certaines couches sociales, certains individus jouent un rôle moteur en fonction de leur place dans la production et de leurs qualités propres. Ils aident plus ou moine la classe à se constituer en classe.

Des couches sociales sont plus remuantes que d'autres ou clament plus fort leur mécontentement. Il faut se méfier des apparences. Un groupe plus turbulent qu'un autre peut finalement ne pas se révéler très révolutionnaire. Il bouge pour des raisons qui lui sont très personnelles. Il rue dans les brancards parce que son statut se dégrade. Mais il n'arrive pas à prendre pour cible les fondements de la société. Peut-être prendra-t-il plus peur à la vue de la révolution qu'à celle du capital.

Ceux qui paraissent le plus intégrés, le plus calmes parce qu'ils sont choyés par le système peuvent en se réveillant aller droit au but. Le pouvoir et l'assurance que leur situation leur confère peuvent leur permettre d'attaquer sans concessions le capital.

On ne peut considérer l'évolution des individus et des couches sociales indépendamment de la profondeur du conflit et de la situation d'ensemble. Certaines couches sociales, comme les étudiants , les intellectuels, les cadres ne peuvent s'élever par elles-mêmes qu'à une conscience corporatiste ou pire pseudo-révolutionnaire. Que le communisme se développe et ces couches, en fonction même du manque d'autonomie qui les caractérise, se radicaliseront. N'ayant pas de puissance et d'intérêts réels à défendre elles ne pourront en trouver qu'en rejoignant et en soutenant les ouvriers.

L'immense masse des paysans du tiers monde peut-elle participer à la révolution communiste ? Fait-elle partie du prolétariat ? Oui, mais non en fonction de son degré de misère. Elle fait d'autant plus partie du prolétariat que l'emprise du capital sur son existence est plus directe.

Même si elle n'est pas salariée elle tend à se joindre à la classe des salariés à cause de l'emprise croissante de l'économie marchande sur l' ensemble des hommes et des ressources. L'offensive des prolétaires salariés l'aidera à trouver l'ennemi et les solutions.

Le salariat est en quelque sorte la relation d'exploitation idéale du capital. On ne peut cependant assimiler prolétaires et salariés. L'on a déjà montré que des relations esclavagistes s'intégraient à l'univers capitaliste en changeant ainsi de contenu. De nombreux petits propriétaires sont directement soumis à l'exploitation capitaliste et opprimés souvent plus que les salariés. Les dirigeants des grandes firmes reçoivent des salaire. Tout en fait pourtant des bourgeois. Ils fixent eux-mêmes leur salaire et ce salaire n'est qu'une part de leur revenu réel.

Certaines professions développent plus des attitudes révolutionnaires que d'autres. La question dépend notamment du degré d'identification qui existe entre le travailleur et sa fonction.

Certains se prennent au jeu. Ils ne peuvent pas prendre de recul par rapport au travail qu'ils exercent. Soit que ce travail, comme pour les éducateurs, fasse d'eux-mêmes leur propre outil. La remise en cause de leur rôle professionnel passe par une remise en cause d'eux-mêmes. Soit que le produit de leur travail ne soit pas un produit et contribue directement au fonctionnement de leur entreprise.

Dans les deux cas risque de se développer une idéologie justificative de leur fonction professionnelle et de ses contradictions. Les plus aliénés finissent par croire que grâce à leurs capacités propres ou à l'utilité générale de leur boulot ils révolutionnent la société.

Les travailleurs les plus lucides sont souvent ceux qui ne se sentent pas liés à l'entreprise ou à la tâche qu'ils remplissent. C'est le cas de la plupart des ouvriers.

Par leur place dans la production, la solidarité qu'elle engendre, leurs qualités humaines les ouvriers seront au coeur de la révolution communiste. L'ouvrier américain ou soviétique même si il survit plus facilement que le mendiant indien et même si il est plus corrompu est aussi mieux placé pour reconnaître la nature de l'oppression qui pèse sur lui et y mettre fin.

Il est de tradition de dénier à la classe ouvrière son rôle central dans la révolution.

On met en avant son absence dans les luttes de libération nationale qui ont pourtant débouché sur des états marxistes.

On insiste sur l'absence de conscience révolutionnaire de la grande masse des ouvriers des pays riches et sur les avantages qu'ils retirent du système.

On confie à d'autres catégories sociales le rôle que les ouvriers semblent incapables de remplir. Les révolutions du 19e siècle auraient été le fait d'artisans. Au 20e siècle les intellectuels léninistes auraient pris le relai. Dans les pays du tiers monde il s'agit des paysans.

Si l'on recarde sérieusement les choses on voit que les ouvriers ont régulièrement été au centre des tentatives de transformation radicale de la réalité. On leur reproche de n'être pas intervenus dans des révolutions qui étaient en fait bourgeoises. Lorsqu'ils sont intervenus on relègue leur action à l'arrière-plan pour mettre en avant celle de groupes sociaux qui au démarrage ou à la fin se sont montrés peu communistes. On met en avant et on exagère telle ou telle caractéristique des prolétaires qui se sont révoltés pour montrer qu'ils étaient des ouvriers douteux ou marginaux, des paysans, des petits bourgeois, des soldats, des voyous déguisés en ouvriers.

Des modernistes remplacent un prolétariat embourgeoisé par de nouvelles catégories. La révolution serait l'oeuvre des jeunes parce qu' ils ne sont pas encore domestiqués, des femmes parce qu'elles sont plus près de la vie, des hippies et autres marginaux parce qu'ils sont extérieurs au système, des noirs parce qu'ils aiment la musique et ont le rythme dans le sang... D'autres ne voient plus la nécessité de privilégier une catégorie particulière. Le capital est une force inhumaine dont tous sont victimes, c'est donc l'humanité en tant qu'espèce qui doit se soulever. Il n'y a plus de bourgeoisie et de prolétariat, ou alors si peu.

Lorsque l'on met en avant tel ou tel groupe social ou catégorie d'âge ou de sexe on le fait en vertu des valeurs que ces groupes sont censés porter. Il n'y a pas tant un changement dans le choix du sujet révolutionnaire qu'une reconnaissance implicite de la réalité telle qu'elle est. Les jeunes seraient révolutionnaires en tant que jeunes, les femmes en tant que femmes, alors que le prolétariat qui comprend des jeunes et des femmes est révolutionnaire dans la mesure où il ne peut plus être le prolétariat. Le prolétariat n'est pas un groupe social. Il est un mouvement. Il est ce qu'il devient. Il existe en fonction de ses possibilités d'auto-destruction.

Nous ne disons pas que les jeunes, les femmes, les infirmes de guerre... n'ont pas des intérêts spécifiques et qu'ils ne peuvent pas transformer la réalité. Simplement, à moins qu'ils agissent en tant que prolétaires, ils ne peuvent que défendre leurs intérêts de jeunes, de femmes, d'infirmes de guerre au sein d'une réalité donnée. La révolution prolétarienne leur donne le moyen, sans se renier, d'aller au-delà de leurs revendications catégorielles, de les dépasser. Ce sont des jeunes, des femmes, des infirmes qui agissent mais ils ne le font plus pour la jeunesse, la féminité ou son contraire, des allocations de l'état et la considération des citoyens.

Et les intellectuels ?

D'une certaine façon la révolution exige que les prolétaires deviennent des intellectuels. Il leur faut être capable d'aller, au-delà de leur situation immédiate. Il est connu que lors des insurrections l'on voit discuter dans la rue des questions qui étaient avant l'apanage des philosophes.

La révolution signifie aussi la fin des intellectuels en tant que catégorie sociale séparée. Si les intellectuels participent à la révolution ils ne peuvent le faire qu'en niant leur condition. En reconnaissant qu'ils sont mutilés. Eventuellement il faudra prendre des mesures pour empêcher que l'on puisse continuer à être un intellectuel et rien d'autre.

On attribue souvent aux intellectuels un rôle privilégié en tant que porteurs de la conscience. Par elle-même la conscience n'est rien et ne peut rien. Nos intellectuels qui souvent ont cru pouvoir s'élever à la compréhension générale et objective des choses ont en fait été régulièrement à la remorque des pouvoirs établis. Ils ont été sujet aux pires illusions et ont soutenu, bien sûr avec l'esprit critique, les pires saloperies. Prêts à tout excuser au nom de la Raison, de l'Histoire, du Progrès.

Les revendications des intellectuels sont mieux faite pour émouvoir les coeurs bourgeois que celles des ouvriers. Combien il est plus noble de demander la liberté d'expression que de réclamer du pain. L'intellectuel semble être le défenseur de l'intérêt général. L'ouvrier semble égoïste et à ras de terre.

Pourtant les revendications prolétariennes sont plus profondes que celles des intellectuels. Ceux-ci se font une spécialité de réclamer des formes vides. Lorsque les ouvriers réclament ou plutôt imposent la liberté d'expression c'est qu'ils ont quelque chose à dire. Autrement cela ne les intéresse relativement peu. Leur capacité à ne pas dissocier la forma et le contenu, à ne pas se battre pour du vent est le signe du communisme. Le problème des intellectuels c'est que le vent c'est souvent ce dont ils tirent leurs revenus.

Les jeunes sont souvent les plus actifs dans les révolutions. Il y a peut-être des causes biologiques mais leur situation sociale suffit à l'expliquer. Même ceux qui viennent des couches privilégiées sont moins liés aux intérêts en place. Il faut attendre d'hériter ! La société capitaliste fétichise la jeunesse et le renouvellement mais éloigne les jeunes des postes de responsabilité et de la propriété. Ils se trouvent plus disponibles.

A côté des jeunes l'on met parfois en avant les marginaux. Ils ne vivent pas comme tout le monde, peut-être sont-ils l'avenir ? Là encore il y a incapacité è comprendre que la révolution puisse et doive surgir du sein même du système. Il y a incapacité à comprendre dialectiquement ce qu'est le prolétariat. Il y a illusion sur le degré d'indépendance des marginaux à l'égard du système.

Le capital aurait-il lui-même aboli les classes sociales en prenant la révolution de vitesse ? Il y a longtemps que l'on prétend que la révolution bourgeoise a enfin permis à tous les hommes d'être égaux.

La division de la société en classes se porte bien. Elle n'a peut-être jamais été aussi accentuée, même si jamais de tels moyens n'ont été mis en service pour la faire oublier.

Certes le capital est une force impersonnelle. Certes tous subissent plus ou moins ses effets. Pauvres bourgeois qui s'épuisent au travail, se disputent avec leurs enfants, respirent un air malsain !

Les effets du capital, certains ont plus que d'autres la possibilité d'y remédier. La différence des conditions de vie est aujourd'hui considérablement développée. Les possibilités de diversifier les produits, le développement du commerce ont fait que certaines couches de la population ont un niveau et une qualité de vie bien différente et supérieure à celle de leurs contemporains. Peut-être bien que les bourgeois ne sont pas les plus heureux. Ils peuvent au moins cesser d'être des bourgeois. L'inverse n'est pas possible pour les cantonniers. Si même les bourgeois ne sont pas contents de leur mode de vie c'est une raison de plus pour abolir cette classe et sa société.

La bourgeoisie ne parade pas. Elle laisse ça à quelques parvenue. Il n'est pas dans son intérêt de trop étaler le mode de vie qu'elle mène à l'abri de ses datchas et de ses plagies privées. Les prolétaires ont pour habitude de surestimer les revenus des couches sociales qui leur sont proches et de surestimer ceux des vrais bourgeois.

Les bourgeois auraient-ils un mode de vie austère et frugal que cela ne les ferait pas disparaître en tant que classe. Ce qui compte c'est d'abord leur fonction économique et sociale. Leur revenu y est évidemment directement lié. Une partie de leur consommation, y compris dans les pays de l'ouest, se confond avec des dépenses d'affaires. L'on voyage, l'on dîne, l'on baise pour et sur le compte de son entreprise.

Le capital a tendance, et aujourd'hui plus que jamais, à ronger l'identité des groupes sociaux. Aussi bien pour la bourgeoisie que pour la classe ouvrière. L'électeur, le consommateur sont hors classe. La jouissance qui passe par l'achat n'est plus liée à un statut mais à un argent impersonnel. Cette négation capitaliste des classes prépare la société sans classes. Mais elle est niée à son tour par la nécessité économique qui tend à hiérarchiser les revenus et à séparer les fonctions.

Le combat pour le communisme n'est pas un combat pour une classe particulière mais une lutte pour l'humanité. Mais ce combat est lié à ceux à qui l'on dénie toute humanité. La révolution ne fera pas l'unanimité et il est dangereux de le faire croire. Peut-être que quelques bourgeois rallieront le mouvement, cela ne changera rien au fait que les intérêts de la bourgeoisie et le communisme sont contradictoires. Le prolétaire gagnera immédiatement à la révolution alors que le bourgeois s'y fera déposséder. Le communisme concerne l'espèce humaine, mais il y a des hommes qui peuvent identifier leur intérêt immédiat dans une période de rupture à ceux de l'espèce, d'autres non.



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