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Le privilège de Collegium Poetarum et Mathematicorum viennois (1502-1508) à couvrir de lauriers ses diplômés:

Sur une forme humaniste de remis des diplômes

 

 

Iuliana  Vãtui,

Université de Freiburg am Briesgau

 

“[…] et mihi delphicca Lauro cinge volens, Melpomene comam […]”

(Horace, Carmina III, 30)

 

Les humanistes de Trecento italien ont aspiré à être couverts de lauriers, comme jadis le poète latin Horace. Les empereurs allemands, sur l’exemple des potentats italiens, ont couvert de lauriers des litterati, à l’occasion de leurs voyages en Italie, de la même manière qu’ils donnaient l’accolade aux chevaliers. Peu à peu cette pratique s’est étendue dans l’Empire, auparavant étant appliquée aux Italiens. En 1442 Aeneas Silvio Piccolomini a été couvert de lauriers à Francfort par la main de l’empereur Frédéric III (1440-1493). C’était d’abord la première fois quand l’empereur officiait une telle cérémonie sur la terre germanique et l’écho de cet événement a pourtant nourri les aspirations des hommes de lettres allemands. Jusqu’au moment où en 1478 Conrad Celtis a été couvert de lauriers par le même empereur, le titre de poeta laureatus semblait être réservé aux humanistes italiens.

Le lettré Maximilien Ier (1493-1519) aux velléités chevaleresques a couvert de lauriers d’une manière encore plus généreuse que son prédécesseur, cette fois surtout les poetae et oratores allemands. Après son règne cette cérémonie a été surpassée et mise hors de l’usage par d’autres pratiques. L’association des lauriers avec des accomplissements poétiques a été gardée de moins par des représentations mentales, si on juge le Torquato Tasso goethéen. Le Collegium Poetarum et Mathematicorum[1] a été de courte durée et son influence directe assez faible par rapport aux grandes vues de son surintendant – l’humaniste Conrad Celtis[2]. Même si l’existence de Collegium Poetarum et Mathematicorum fut fulgurante, son statut et ses buts sont représentatifs pour la tentative de réformer l’enseignement universitaire dans l’Empire, conformément aux principes humanistes. Entre les insignia doctoralia de cette institution d’enseignement, le laurier représentait la pièce la plus chargée symboliquement.

Avec cette précision on offre tout de suite la clef pour l’emploi du titre poeta laureatus par le Collegium Poetarum et Mathematicorum: il s’agissait d’un grade

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universitaire à la fin d’une étude humaniste. Suivant ce fil on peut suivre la trace du combat humaniste figé aux conceptions traditionnelles, à mesure que ses armes ne se limitaient pas aux arguments logiques, mais concernaient aussi l’emploi des symboles et rituels universitaires. On mettait ainsi en scène par ce cérémonial un contenu programmatique qui concourait la tradition scolastique[3]. Pour circonscrire cet emploi exceptionnel de laurea on va passer en revue l’usage de la cérémonie afférente par Maximilien Ier, ainsi que la signification du titre de poeta laureatus pour Conrad Celtis. A cette distinction accordée solennellement à l’humaniste par Frédéric III s’ajoutait un quart de siècle plus tard le privilège de couronner des poètes. A titre exceptionnel c’était un humaniste – d’ailleurs d’origine sociale très modeste qui avançait dans une «position princière». Par le privilège acquis il a gagné de nouvelles possibilités pour s’alléguer sur une conception humaniste d’enseignement et la mettre en pratique. Je restreindrai la perspective ouverte dans le but de surprendre la forme concentrée prise par cette emprise humaniste à la voie de laurea ainsi que de l’emploi de cette enseigne dans le cadre solennel de la remise de diplôme universitaire.

Bien que Pétrarque n’ait pas été le premier poeta laureatus de la Renaissance italienne, c’est son couvrement de lauriers qui a eu l’éclat nécessaire pour fonder une tradition[4]. Si le cérémonial tenait la traîne de son correspondant antique, la valeur prise pour Pétrarque[5] par laurea (myrto ou hedera) réfléchissait la conscience de soi et les attentes d’un humaniste. Pétrarque attribuait au poeta doctus des compétences de magister, poeta et historicus, qui le recommandaient en qualité de bon connaisseur des œuvres classiques. Avec le laurier, le myrte ou le lierre on conférait au poeta le droit d’enseigner à l’université. Cet aspect a été préservé chez les couronnements des poetae allemands pris en considération

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plus tard par Maximilien Ier: le titre obtenu ouvrait au poeta doctus la voie d’accès dans l’enseignement supérieur. L’empereur a pourtant tiré de son côté cette forme de faire distinction[6], en la transformant dans une faveur impériale accordée conditionnellement à ceux qui ont servi ses besoins de représentation publique.

Maximilien Ier couvrait de lauriers 29 litterati, hommes de science et fonctionnaires. La distinction de poeta laureatus remplissait à l’Aetas Maximiliana surtout une fonction dans un système de dépendances et services réciproques[7]. Le laurier scellait un pacte inégal entre le poète et son mécène: à l’abri du maître princier, le poète faisait usage de son talent en fondant ou défendant le prestige de celui-ci. On supposait tacitement que le «poète en armes» devait loyauté à son protecteur.

Le patronage culturel déployé au nom de l’empereur avait sans doute comme but de forger son prestige personnel à l’intérieur et en dehors. Toutefois on remarque chez Maximilien une conception, qui me semble être symptomatique pour une époque de renforcement de l’individualisme. La mémoire (Gedechtnus), plus qu’un motif littéraire trivial, jouait dans Weisskunig le rôle d’une «figure de pensée» (Denkfigur) en figeant une attitude de vie: “wer im in seinem leben kein gedachtnus macht, der kann nach seinem tot kein gedächtnus und desselben manschen wird mit dem glockendom vergessen”[8]. En assurant la mémoire de ses faits Maximilien pouvait jouer sur une sorte d’éternité: sa présence se prolongerait par le souvenir au delà du miracle d’une existence finit … et il survivrait[9]. On y retrouve chez Maximilien le même esprit, que dégage l’exclamation inscrite sur l’épitaphe de l’humaniste Conrad Celtis: VIVO!

Celtis allait s’établir à Vienne[10] après avoir reçu une offre de nomination à l’université de la part de Maximilien Ier[11]. Son lobby près de l’empereur était assuré par

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un cercle d’amis, dont le vif soutien lui permettait de concrétiser certains projets. Dans la ville résidence impériale Celtis préparait «l’édition de la fin du siècle» des ses œuvres[12], animait le cercle humaniste Sodalitas litteraria Danubiana et éditait le traité de cosmologie De mundo (1497), ainsi que les drames chrétiennes de la monalis Hrotsvith (1501). Le temps n’a pas été suffisant pour accomplir le projet de sa vie d’écrire une oeuvre d’histoire, de géographie et d’ethnologie de l’Allemagne: Germania illustrata[13]. Celtis était un homme de lettres consacré au temps de sa nomination comme titulaire universitaire de poétique à l’université viennoise. Le diplôme impérial de 18 avril 1487 accordait le laurier à Celtis, qui s’était distingué par de connaissances approfondies de langue grécque et son ingenius poétique. Celui-ci avait d’ailleurs donné au jour de son couronnement comme poète une praegustamentum[14] de la manière dans laquelle il comprenait à servir le bon renom de sa majesté.[15] Le titre de poeta laureatus était pourvu de privilèges[16]: premièrement il certifiait à Celtis la qualification de studii humanitatis laureatus[17], qui l’autorisait à tenir des cours de poétique et rhétorique à l’université.

Quand à l’aube de sa vie il réunissait les lettres reçues dans un Codex epistolaris, l’humaniste allemand tenait à dater sa correspondance en années après annus laureae. Le titre de poeta laureatus confinait à la carrière de Celtis à son point de départ[18]. Son

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parcours atteignait le point culminant par la fondation du Collegium Poetarum et Mathematicorum, qui apportait à Celtis la qualité de gérant du laurier[19] et la reconnaissance suprême de son rôle éminent dans la promotion des arts dans l’Empire. Le même diplôme[20] émis par la chancellerie impériale prévoyait dans sa partie dispositive la création de quatre chaires universitaires: une chaire pour la poétique, une pour la rhétorique et deux pour les mathématiques[21]. Le surintendant du Collège était le maître-poète, les disciplines réalistes lui étant alors subordonnées. Le Collegium Poetarum et Mathematicorum commençait son activité le 1er février 1502 dans une maison près de l’église St. Anna, habitée par Celtis[22]. Le Collège des Poètes disposait des enseignes: sceau et sceptre, barrette, la couronne de lauriers et l’anneau de son surintendant[23]. Hans Burgkmair le Vieux[24] a gravé le laurier beaucoup plus grand dans l’ensemble des enseignes, en apportant ainsi “à l’arrière” le symbole le plus représentatif pour cette institution d’enseignement. Ces enseignes (sceau et sceptre, la couronne de lauriers et l’anneau de son surintendant) ont été gardées après la mort de Celtis (1508) dans un coffre, qu’on retrouvait par hasard en 1809. On peut les voir aujourd’hui dans l’archive viennoise[25]. En vertu du privilège d’accorder le titre de poeta laureatus aux diplômés examinés et considérés dignes de cette distinction, le Collegium Poetarum et Mathematicorum a été considéré à l’époque comme la cinquième faculté de l’université viennoise[26]. Cette étiquette s’est préservée bien après la disparition du Collège des Poètes, restant longtemps liée à son souvenir[27].

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Par l’institution d’une chaire supplémentaire de droit civil et par la fondation du Collegium Poetarum et Mathematicorum, Maximilien Ier, sans rompre radicalement avec la structure traditionnelle de l’enseignement, a réorganisé l’université viennoise en lui donnant un profil plus attractif pour les besoins de l’Etat. Les qualifications nécessaires pour une carrière à la Cour étaient: l’éloquence, la diplomatie et la routine dans le discours public, ainsi que des connaissances pratiques (astrologie pour le médecin princier). L’enseignement humaniste se mariait mieux à la demande d’une administration d’Etat structurée et plus efficace en cours d’établissement.

Les universités étaient à la fin du Moyen Age organisées à la façon de l’Alma Mater l’université de Paris, c’est-à-dire elles avaient une structure corporatiste et le droit de remettre des diplômes. Leur statut était symboliquement actualisé et affirmé par des rituels académiques (la cérémonie de fin d’année, à l’occasion des processions religieuses et fêtes universitaires: la Sainte Catherine chez les artistes) et par l’utilisation des enseignes: sceptres, sceaux, matrices, robes et barrettes, anneaux. Surtout le sceptre et le sceau soulignaient l’autonomie universitaire.

Les quatres facultés viennoises s’identifiaient à la voie de leurs enseignes (sceau et sceptre) munies des figures spécifiques: la sainte Catherine, qui a vaincu dans une dispute les philosophes païens, était la préférée des «artistes», la déesse Justitia garantissait le jugement pertinent des juristes, l’évangéliste Lucas protégeait les médecins. L’étudiant qui venait de devenir magister ou docteur entrait dans la possession d’une licentia ubique docendi, qui était reconnue par toutes les universités. A son tour le Collegium Poetarum et Mathematicorum disposait des enseignes pour marquer son statut autonome. Le titre de poeta laureatus était équivalent au grade universitaire de magister ou docteur accordé pour la médecine, le droit et la théologie. Ayant la possibilité d’accorder des diplômes et des enseignes pour souligner son autonomie, le collège[28] s’encadrait d’une part dans une tradition des symboles et rituels académiques et d’autre part on donnait au niveau du cérémonial une réplique humaniste à la remise de diplôme traditionnelle.

Le programme humaniste de Conrad Celtis, dont le parcours illustrait le destin d’un humaniste errant[29], se présentait dans une forme peu élaborée dans Panegyris ad

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Duces Bavariae[30], se cristallisait dans son discours inaugural à l’Université de Vienne et subissait ultérieurement quelques modifications, qu’on avait peu ou pas du tout signalées dans la littérature de spécialité. Dans son oratio inaugurale à l’Université de Ingolstadt[31] Celtis demandait le retour à l’éducation antique par l’acquisition des langues grecque et latine ainsi que par l’étude de la poétique, de la rhétorique, de la philosophie et des sciences naturelles[32]. L’étude des artes liberales aurait une influence bénéfique sur l’homme, en le déterminant à devenir meilleur et plus heureux. Le but suprême de l’éducation était à conduire l’homme vers la contemplation de Dieu et de sa magnifique Création.

Les métiers juridiques[33] supposaient des aptitudes rhétoriques[34] et une bonne culture générale. On attendait que le délégué dans une mission diplomatique fût un bon orateur et qu’il ait un large horizon culturel. Celui-ci devait être familier avec l’histoire, la géographie et l’ethnologie de sa patrie. D’une manière persuasive Celtis insistait sur les bénéfices d’une étude humaniste qui formait de bons orateurs[35]. L’art rhétorique demandait docere, conciliare, delectare, permovere – c’est-à-dire à provoquer ou apaiser des affects et à transmettre un contenu scientifique. Ratio sans oratio valait trop peu aux yeux de Celtis, car à quoi bon toute science sans la possibilité de la communiquer? L’humaniste allemand plédoyait de plus pour le métier de poeta et croyait que celui-ci s’assurait par son oeuvre une mémoire éternelle. Il chargeait le poète des attributions d’un

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historiographus en l’exhortant à approfondir l’histoire nationale et à en donner compte[36]. A mesure qu’il devait glorifier la mémoire de l’empereur régnant, le poeta s’érigeait au rang de historiographus de la Cour.

Le oratio inaugurale établissait les piliers de l’enseignement humaniste[37]: (1) une forme élargie de trivium et quadrivium[38], (2) une importance croissante attribuée à l’art rhétorique, (3) l’étude de l’histoire conçue comme étape préliminaire avant d’écrire une histoire nationale, (4) l’accent mis sur l’applicabilité des connaissances acquises, (5) la définition de poeta comme le produit le plus élevé de cette éducation. Un motif qui revient dans ce discours universitaire concerne l’accomplissement de translatio carminum ou artium dans l’Empire. La confiance dans cette possibilité[39] était d’abord le nerf vigoureux qui a enflammé presque toutes les initiatives de Celtis.

Les vues humanistes de Celtis connaissaient à la longue des modifications et des enrichissements. Sous l’influence néoplatonicienne l’humaniste postulait l’unité fondamentale du monde, dont le premier principe serait l’amour[40]. La connotation épistémologique de cette vision du monde était la considération que seulement l’approche fournie par tous les moyens de connaissance permettrait la compréhension appropriée de l’ordre universel. On attendait du poeta philosophus la subtilité d’esprit nécessaire pour mettre en valeur les échanges réciproques entre les disciplines et leur complémentarité[41]. Dans cet effort de compréhension de l’ordre universel, les connaissances acquises et les perspectives ouvertes se conjugueraient pour découvrir et mettre en relief les qualités

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humaines présentes en état latent dans l’âme de chaque individu[42]. Dans une gravure à Amores Albrecht Dürer[43] offrait une représentation suggestive du procès d’élévation, parcouru par l’étudiant des artes humanitatis: en montant de degré en degré l’escalier des disciplines de trivium et quadrivium[44], celui-ci s’élevait toutefois du stade inférieur de vita philargica (trop soumise aux affects) à la capacité d’autocontrôle propre à la vita teoretica[45].

Esprit innovatif et nature effervescente, Celtis expérimentait des méthodes pédagogiques nouvelles. Il employait des cartes (tabulae antiqui et moderni) et globes terrestres[46], quand il référait par exemple sur la Cosmographie de Ptolemaios. Pour cultiver les aptitudes déclamatives de ses étudiants, il mettait en scène des pièces de théâtre. Quand il expliquait le numerus Horatius, Celtis tenait à suivre l’exemple des Antiques, dont il croyait qu’ils s’adonnaient à accompagner la récitation poétique à la lyre, sinon à chanter les poésies au lieu de les réciter. Faute d’un graece eruditus il enseignait lui-même à ses élèves la langue grécque, étant d’ailleurs le premier humaniste allemand qui employait l’Ilias en s’appuyant sur l’original homérique. Les diplômés de Collegium Poetarum et Mathematicorum obtenaient le titre de poeta laureates. Les mathématiques, autour desquelles s’agglutinaient les disciplines réalistes, étaient subordonnées à la poétique et

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la rhétorique. Il faudrait qu’au bout d’une étude concernant des disciplines humanistes tout comme des sciences naturelles, le laurier revienne au poeta philosophus.

Les réflexions poétologiques de Celtis tournaient autour de l’idée que le poète a la vocation de créer par son oeuvre un microcosme[47]. La définition de la poésie dans l’Ars versificandi et carminum[48] formulait la prémisse que le poeta philosophus est capable dans un cas idéal de comprendre la structure enchiffrée du cosmos et de ses lois, et qu’il a la faculté d’exprimer la connaissance acquise dans la forme sublimée de la poésie[49]. Son “établissement” du monde en vers ne représenterait pas une simple mimesis de la nature, mais une imitation de l’acte créateur de Dieu. La pensée philosophique aux ondulations lyriques a été vouée par conséquent à la plus digne activité humaine[50].

L’existence de la distinction de poeta lauréates donnait cours à l’essai d’affirmer l’autonomie des artes libérales (maintenant artes humanitatis)[51]. Près du titre de poeta doctus c’était le cérémonial correspondant qui exprimait les désiderata et les buts d’une conception humaniste d’enseignement. Le collège n’a pas formé des poètes, mais des fonctionnaires. Le surintendant du Collegium Poetarum et Mathematicorum ne faisait pas usage du privilège acquis de couvrir aux lauriers. Pourtant on peut comprendre – de Privilegium … émis par Maximilien d’une part et des illustrations de l’époque d’autre part – quelques aspects, qui sont relevants pour le contenu idéatique et sa mise en valeur par le cérémonial prévu dans les circonstances créées par la fondation du Collegium Poetarum et Mathematicorum.

Si on considère des représentations d’une telle cérémonie, on remarque que le couronnement comme poeta laureatus présentait des similitudes avec le cérémonial d’armement du chevalier. L’empereur donnait pratiquement l’accolade au poète agenouillé, qui recevait comme signe de son statut les lauriers. On remarque ici l’étroite liaison établie entre le poète et l’empereur et, par conséquent, la possibilité que le rôle

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de poeta Cesarei se limite à la fonction d’un héraut impérial. Des motifs pécuniaires ont mené Celtis à souligner maintes fois une telle disponibilité personnelle[52], qu’il a de même étendue au compte de ses élèves[53]. Le privilège de Collegium Poetarum et Mathematicorum apporte un indice supplémentaire, qui justifie la parallèlisation du couvrement de lauriers avec la fin d’études universitaire. Le diplôme prévoyait que les lecteurs de poétique et rhétorique devaient établir auparavant si le candidat au titre de poeta laureatus était digne de cette distinction. Cette clause avait son correspondant dans les statuts universitaires, qui prévoyaient l’examination des diplômés avant la remise du diplôme. Passer cette examination préalable[54] représentait une condition indispensable pour licentia incipiendi.

Un moment constitutif de la cérémonie traditionnelle de la fin d’études universitaires (inceptio)[55] était représenté par la dispute savante. Après avoir reçu la robe et la barrette, le diplômé s’asseyait dans le cathedra pour donner une disputatio en qualité de magister[56]. Par contraire, le poeta laureatus devait faire preuve devant le public réuni de ses qualités de poète et d’orateur en récitant des créations poétiques propres et en brillant par un discours vivace et convaincant[57]. A la différence de la dispute futile des savants (matérialisée par Discordia sur le placat-réclame du collège!)[58], le discours s’adresse au public et s’accorde aux besoins et désirs de l’auditoire. Oratio suppose alors une autre référence à l’auditoire que la dispute scolastique.

En vertu de la différence qualitative signalée, la présence de oratio[59] dans un rituel académique se montre à être significative pour le rapprochement et la valorisation

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humaniste de scientia[60]. Le but du collège était de rompre avec une tradition scolastique trop élitiste et trop éloignée des besoins immédiats de la société: “publicarum rerum moderatores ac rectores ut plurimum excellentes prodire”, “eloquentiam restituere”[61]. Les perspectives de officium poetae étaient déjà symboliquement évoquées par l’emploi du laurier, qui correspondait dans le deployement du cérémoniel au talar ou à la barrette[62] de la fin d’études universitaires. Le Collegium Poetarum et Mathematicorum représente une emprise humaniste, issue de la congruence des intérêts et vues de Conrad Celtis et de Maximilien Ier. L’humaniste allemand obtenait un privilège extraordinaire au nom d’une institution, qui était d’ailleurs assez étroitement liée à sa personne, que le diplôme impérial lui accordait explicitement le droit de couvrir aux lauriers. Le Collège des Poètes et Mathématiciens se présente comme une institution d’enseignement humaniste par son curriculum, mais aussi par la cérémonie à la fin d’études universitaires au but de laquelle le diplômé recevait le titre de poeta laureatus.

 

 

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1. Les enseignes de Collegium Poetarum et Mathematicorum (gravure de Hans Burgkmair).

 

 

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2. Le placat-rèclame de Collegium Poetarum et Mathematicorum (gravure de Hanns Burgkmair).

 

 

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3. L’épitaphe de Conrad Celtis (gravure de Hans Burgkhmair).

 

 

 

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4. La Philosophie (gravure de Albrecht Dürer).

 

 

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© ªerban Marin, October 2005, Bucharest, Romania

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[1] Encore actuelle reste l’étude de Gustav Bauch, Die Reception des Humanismus in Wien, Breslau 1903.

[2] La dernière monographie sur Celtis appartient à Lewis W. Spitz, Conrad Celtis. The German Arch-Humanist, Cambridge 1957; comme lecture introductive on recommande: Dieter Wuttke, «Conradus Celtis Protucius», dans Deutsche Dichter der frühen Neuzeit (1450-1600). Ihr Leben und Werk, édite par Stephan Füssel, Berlin 1993, pp. 173-199.

[3] Arnold Seifert, «L’Integrazione dell’Umanesimo nelle università tedesche», dans Annali dell’Istituto Storico Italo-Germanico in Trento, no. 5, 1979; James H. Overfield, Humanismus and Scholasticism in Late Medieval Germany, Princeton 1984.

[4] Ernest H. Wilkins, «The coronation of Petrarch», dans Speculum, no. 18, 1943, pp. 155-197; Werner Suerbaum, «Poeta laureates et trimphans. Die Dichterkrönungen Petrarcas und sein Ennius-Bild», dans Poetica, no. 5, 1972, pp. 293-328.

[5] Voire le discours de Pétrarque à l’occasion du couronnement au laurier et le texte du diplôme impérial, qui était conçu par l’humaniste Francesco Petrarca; Herold, Johannes, «[Opera quae extant omnia] Francisci Petrarchae ... Opera quae extant omnia: In quibus praeter Theologica, Naturalis, Moralisq[ue] Philosophiae praecepta, liberalium quoq[ue] artium Encyclopediam ... coniucta inuenies. Adiecimvs Eivsdem Avthoris, Qvae [Hetrvsco Sermone Scripsit Carmina Sive Rhythmos]: in quibus Graecorum gloriam ... uisus est; Haec quidem omnia nunc iterum summa diligentia à uarijs mendis, quibus scatebant, repurgata …», dans Tomos quatuor distincta. Quae uerò unoquoque Tomo continentur, uersa pagina Lectori exhibebit, édite par Johannes Herold, 1581 (lat., ital.), note de l’imprimeur: Basileae, Per Sebastianvm Henricpetri. Colophon, Anno A Virgineo Partv M.D.XXCI. Mense Martio, Munich 1993. Microfiche-No. C1672-C1684: 36x. Dieter Mertens mentionne un autre exemplaire plus vieux du diplôme impérial: Tübingen UB, Cod. Mc 137, fol. 281v-282v; Dieter Mertens, «“Bebelis … patriam Sueviam … restituit”. Der poeta laureatus zwischen Reich und Territorium», dans Zeitschrift für Würtembergische Landesgeschichte, no. 42, 1983, pp. 145-173.

[6] Celle-ci reconnaissait aux yeux de Pétrarque, hors de toute forme de conditionement de politique princière, les services apportés par un interprète de l’héritage antique.

[7] Alois Schmid, «“Poeta et orator a Caesare laureatus”. Die Dichterkrönungen Kaiser Maximilians I», dans Historisches Jahrbuch, no. 109, 1989, pp. 56-108.

[8] Kaiser Maximiliens I. Weisskunig, édite par Heinrich Theodor Musper, Stuttgart 1956, pp. 225 seqq.

[9] La différence face à la piété chrétienne d’un roi médiéval comme Charles IV était frappante. En comparaison avec Maximilien Ier le roi d’origine bohémienne priait en considération surtout le Jugement Denier et tenait la gloire terrestre pour éphémère, en disant que les rois aussi entreront en oubli pour les descendants éloignés; Eugen Hillenbrand, Vita Karoli quarti. Die Autobiographie Karls IV. Einführung, Übersetzung und Kommentar, Stuttgart 1979, pp. 67-81.

[10] On peut parler d’une la pénétration lente mais sure de l’humanisme à l’Université de Vienne. Un renseignement introductif sur l’histoire de l’Université de Vienne offrent Franco Cardini, M. T. Fumagalli Beonio–Brocchieri, Universitäten im Mittelalter. Die europäischen Stätten des Wissens, pp. 130-139.

[11] La correspondance de Conrad Celtis a été édité par Hans Rupprich, Der Briefwechsel des Konrad Celtis, München 1934 (=Veröffentlichungen der Komission zur Erforschung der Geschichte der Reformation und Gegenreformation: Humanistenbriefe, 3); on doit prendre l’affirmation de Maximilien, après laquelle l’université manquait des magistri savantes et était proie à la barbarie, comme une exagération, voir Ibidem, p. 459.

[12] Cette édition de Quattuor libri amorum secundum quattuor latera Germanie est issue à Nürnberg avec un retardement de deux années et contient l’oeuvre poétique de Conrad Celtis gruppée dans les quatres livres Amores et le poème Germania illustratis. L’œuvre posthume a été éditée à Strasbourg en sous le nom de Libri Odarum quatuor, cum Epodo, et saeculari carmine. Les éditions modernes des oeuvres de Conrad Celtis appartiennent surtout à Felicitas Pindter: Conradus Celtis Protucius, Libri odarum quattuor. Liber epoden. Carmen saeculare, édite par Felicitas Pindter (lat.), Leipzig 1937 (=Biblioteca scriptorum medii recentisque aevorum, Saecula XV-XVI, 10); Conradus Celtis Protucius, Quattuor libri amorum secundum quattuor latera Germaniae. Germania generalis. Accedunt carmina aliorum ad libros amorum pertinentia, édite par Felicitas Pindter, Leipzig 1934 (Biblioteca scriptorum medii recentisque aevorum, Saecula XV-XVI, 5), Ludi Scaenici (Ludus Diaenae–Rhapsodia), édite par Felicitas Pindter, Budapest 1945 (=Bibliotheca scriptorum medii recentisque aevorum 29).

[13] Gernot Michael Müller, Die „Germania generalis” des Conrad Celtis. Studien mit Edition, Übersetzung und Kommentar, Tübingen 2001.

[14] Celtis avait déclamé à cette occasion-là un panégyrique sur l’empereur: Ad Fridericum tertium pro laurea Apollinari (1487).

[15] Il composait plus tard: Ad Fridericum Caesarem pro laurea, proseutice (ode I, 1), Ad Caesarem dum filium imperio sufficeret, symboletice, in iucunditatem veris.

[16] Le diplôme prévoyait: “[…] ubique locorum et terrarum pro vero poeta laureato reputari et teneri ac deinceps quibuslibet honoribus, privilegiis, libertatibus, gratis et praerogativis gaudere et potiri possia et valeas, quibus ceteri laureati poetae etiam in nostra Imperiali curia degentes gaudeant”, H. Rupprich, op. cit., lettre no. 7, p. 15.

[17] Petrus Petz s’adressait en 1497 à Celtis en l’appelant: “studii humanitatis laureatus”, voir Ibidem, lettre no. 152, p. 254.

[18] Les portraits de Conrad Celtis, parvenus dans les illustrations de ses oeuvres, l’édition des drames de virgo doctissima Hrotsvith, ainsi que sur son épitaphe, sont toujours munis du laurier, qui, avec le blason humaniste, symbolise le statut gagné d’un lettré.

[19] Son épitaphe soulignait sa qualité de LAVREE CVSTOS ET COLLATOR, de personne qui protège et accorde le laurier.

[20] H. Rupprich, op. cit., lettre no. 266 (Privilegium erectionis «Colegii poetarum et mathematicorum» in Vienna du 31 octobre 1501), p. 458-460.

[21] Comme professeurs ont été employés encore Vicentius Longinus pour rhétorique ainsi que Andreas Stiborius et Johannes Stabius pour mathématiques.

[22] Avec l’inauguration du collège on a célébré toutefois le jour anniversaire de son initiateur; on soulignait ainsi de nouveau le lien personnel de Celtis à ce collège.

[23] Franz Gall, Die Insignien der Universität Wien, Graz–Köln 1965, pp. 84-90.

[24] La gravure ornait la pièce de théâtre de Celtis: Rhapsodia, laudes et Victoria de Boemannis (1504-1505) et nous est parvenue aussi sous forme d’exemplaire imprimé séparément. Le premier rapport sur cette gravure provient de Max Thausing, Die Celtis-Ciste der Wiener Universität (1878). Joseph Weiß a attribué faussement la gravure à Albrecht Dürer, voir Joseph Weiß, Von den akademischen Hoheitszeichen und ihren Trägern, «Das akademische Deutschland», 1, 1930, p. 715.

[25] Le coffre a été confectionné en 1508 pour garder le laurier et l’anneau du Collège en vue des prochaines cérémonies de couronnement au laurier.

[26] Il y avait des animosités entre Celtis et les professeurs de la Faculté des arts.

[27] Apud Georg Eder, Catalogus rectorum et illustrium virorum archigymnasij Viennensis. Ab anno M.CC.XXXVII usque ad annum M.D.LIX, Wien 1559, p. 48, apud Peter Luh, Der Allegorische Reichsadler von Conrad Celtis und Hans Burgkmair: ein Werbeblatt für das Collegium Poetarum et mathematicorum in Wien, Frankfurt am Main 2002 , p. 11; Johann Georg Hagelgans a représenté dans sa chronique (1737) toutes les enseignes des universités allemandes, dont il avait eu connaissance. Pour Vienne il a gravé non seulement les enseignes des quatre facultés, mais aussi la couronne de poète – le symbole du collège.

[28] Le collège a eu une existence éphémère, étroitement liée à l’engagement de Celtis pour un projet de l’éducation humaniste.

[29] Comme étudiant à Cologne (1478-1479) Celtis a été déçu par l’enseignement scolastique. Il lui manquait ici une bonne introduction à la grammaire latine, l’étude de la langue grecque, de poétique, astronomie et géographie. A l’Université de Heidelberg il a rencontré l’humaniste Rudolf Agricola et étudiait rhétorique, poétique et langue grecque. 1486-1487 il tenait à Erfurt et Leipzig des lectures de langue grécque, de rhétorique et poétique. A l’occasion d’un voyage en Italie il rencontrait Pomponius Laetus et Marsilio Ficino. A l’Université de Cracovie, qui était jadis le centre universitaire des sciences naturelles le plus renommé, il fréquentait les cours de Albert Blar, qui est devenu plus tard le professeur de Copernicus. Depuis 1491il agit comme chargé de cours (rhétorique et poétique) et ensuite comme titulaire universitaire en Ingolstadt.

[30] Conradus Celtis Protucius, Panegyris ad duces Bavariae et Philippum Palatinum Rheni, édite par Iohannes Rupprich, Lipsiae 1932.

[31] Idem, Oratio in Gymnasio in Ingelstadio publice recitata cum carminibus ad orationem pertinentem, édite par H. Rupprich, Leipzig 1932 (=Biblioteca scriptorum medii recentisque aevorum, 5); Idem, «Oratio in gymnasio in Ingelstadio publice recitata», dans Selections from Conrad Celtis, 1549-1508, édite par Leonard Forster, Cambridge 1948, pp. 36-65.

[32] La structure de oratio se conformait aux règles du genre: après le exordium avec l’apostrophe de l’auditoire, Celtis présentait son parcours jusqu’à la découverte des auteurs classiques (le motif de conversio). Après cette partie de narratio suit l’argumentation de ses points de vues, qui prit la forme d’un plaidoyer pour artes humanitatis. Avant de tenir ce discours, Celtis a consulté l’opinion de ses amis Sixtus Tucher et Gabriel Baumgartener, qui ont donné comme censores leurs avis pour un programme, qui devait exprimer devant un public élargi (le oratio a circulé dans une variante imprimée aussi) les vues des humanistes allemands.

[33] Le discours inaugural de Celtis à Ingolstadt était tenu devant un auditoire principalement formé par des étudiants, qui aspiraient à une carrière juridique.

[34] Celtis associait étroitement poétique et rhétorique. L’ode Ad Fridianum Pignucuim Lucensem infeliciter se ad amorem natum ex configuratione horoscopi sui représente une biographie mythique de Contad Celtis: il soit de son enfance prédestiné pour être un bon orateur (Amores 1,1). De même, après son Vita, signe de son don rhétorique était le cri continuel du nouveau-né, impossible d’apaiser dans ses premiers dix jours de vie, voir H. Rupprich, Der Briefwechsel des Konrad Celtis, lettre no. 339 (Conradi Celtis per sodalitatem litterariam Rhenanam vita), p. 610.

[35] Dans l’ode III, 21 Celtis nommait les manques d’une étude scolastique, comme celle qu’il avait reçu en Cologne: “[…] Nemo hic Latinem grammaticam docet,/ Nec expolitis rhetoribus studet,/ Mathesis ignota est, figuris/ Quidque sacris numeris recludit e.a”.

[36] Germania generalis de Celtis est un prototype de tel ouvrage d’histoire en vers.

[37] La Fête de Sainte Catherine chez la faculté des arts et l’entrée en charge d’un professeur étaient des occasions bienvenues pour soutenir la cause humaniste. Avant Celtis ont tenu des éloges à la Philosophie: Peter Luders (1459) et Rudolf Agricola (1476).

[38] Avec histoire, naturphilosophie, géographie, ethnologie.

[39] Cette idée était déjà formulée dans le premier ouvrage de Celtis Ars versificandi … dans l’ode finale: “Ode ad Apollinem repertorem poetices:/ ut ab Italis cum lyra ad Germanos veniat”. Celtis revenait sur ce point dans sa correspondance en louant par exemple dans une lettre à Sixtus Tucher les jeunes étudiants de l’Université de Ingolstadt, qui étaient capables de aemulatio Italicarum litterarum, voir H. Rupprich, Der Briefwechsel des Konrad Celtis, lettre no. 17, p. 31.

[40] “Tanta coeli et terrae in mutuo amore societas est, ut deorum dearumque connubia (quas activas et passivas Aristoteles virtutes vocat) poetae confinxerint”, Ibidem, lettre no. 275, p. 500.

[41] Dans ce sens Celtis a lié par son concept de Germania generalis les disciplines géographie, histoire et astronomie d’une manière plus étroite qu’auparavant. (Dans le oratio inaugurale Celtis conseillait vivement à la jeunesse allemande de s’adonner à l’étude de l’histoire, de la géographie et de la sagesse populaire des Allemands. Bien que selon lui l’étude géographique et éthonologique ait une signification d’acte patriotique, il demandait seulement la recherche du passé national sans faire mention dans ce contexte de la recherche géographique et éthologique. Au contraire, le concept de Germania generalis, vu comme préambule de Germania illustrata, tient compte de tous ses aspects. Le concept d’ensemble de Amores lie encore de plus géographie, astronomie et des considérations ethnologiques. Ce n’est pas un paradoxe que le corrélat de l’approche interdisciplinaire était à ce temps-là comme aujourd’hui la précision des méthodes de chaque discipline.

[42] On constate à ce point-là la croyance exubérante des humanistes dans la perfectibilité humaine.

[43] La gravure de Dürer est transmise dans une édition partielle des oeuvres de Conrad Celtis (Nürnberg 1502). Christoph Stöcker présente la collaboration entre Conrad Celtis et Albrecht Dürer dans un article, qui a comme point de départ la présence de Celtis comme figure assistante dans une peinture de Albrecht Dürer: Christoph Stöcker, «Dürer, Celtis und der falsche Bischof Achatius. Zur Ikonographie von Dürers Marter der Zehntausend», dans Artibus et historia, no. 9, 1984, pp. 121-137.

[44] Il s’agit d’une représentation de la déesse Philosophie. De sa poitrine tombe une écharpe, sur laquelle les abréviations grécques des artes liberales se joignent au fil entre Phi (bas) et Theta (haut). La figuration en raccourci de bas en haut indique qu’on monte les marches de la scala artium de vita voluptaria vers la vita theoretica. Dieter Wuttke, Humanismus als integrative Kraft. Die Philosophia des deutschen “Erzhumanisten” Conrad Celtis. Eine ikonologische Studie zur programmatischen Graphik Dürers und Burgkmairs, Nürnberg 1985, pp. 13 seqq.

[45] A mon avis il s’agit seulement de l’aspect souligné de vita contemplativa. Les humanistes allemands comme les Italiens ont débattu intensément la question du choix entre vita activa et vita contemplativa (Konrad Peutinger, [Sermones convivales] Sermones conuiuales Co[n]radi peutingeri: de mirandis Germanie antiquitatibus. – Argentinae: Schurer, 1506, [25] Bl.; (lat.) ([Bibliotheca Palatina; München: Saur, 1991. Mikrofiche Nr. E2093.). Le choix de vita activa a prévalé largement sur la décision pour vita theoretica.

[46] Perque globos solidos caelu, terrasque docebo,/Et veteres tabulas edocemque novas, Epigr. 5, 1., Conradus Celtis Protucius, Fünf Bücher Epigramme, édite par Karl Hartfelder, Berlin 1881 (Hildesheim 1963). A consulter aussi Dieter Wuttke, «Textkritisches Supplement zu Hartfelders Edition des Celtis-Epigramme», dans Renatae Litterae. August Buck zum 60. Geburstag, Frankfurt am Main 1973, pp. 105-130.

[47] Celtis a d’ailleurs décrit en vers avec une minitie étonnante des paysages et des phénomènes météorologiques; une présentation édifiante de la poésie de Celtis offre Eckart Schäfer, Deutscher Horaz. Conrad Celtis, Georg Fabricius, Paul Melissus, Jacob Balde. Die Nachwirkung des Horaz in der neulateinischen Dichtung Deutschlands, Wiesbaden 1976, pp. 1-38.

[48] Ecrit au temps de son lecture de poésie à l’Université de Ingolstadt. L’archive de l’Université Albert-Ludwig de Fribourg (am Breisgau) détient un exemplaire de Ars versificandi et carminium, [Verf.: Conradus Celtis] – [Leipzig]: [Kachelofen], [um 1486], 24 feuilles (lat.).

[49] Cf. le parallélisme entre opera Dei et inventa humana sur la gravure de Hans Burgkhmair, désignée à faire réclame pour le Collegium Poetarum et Mathematicorum, qui déployait son activité sous les ailes de l’Aigle impérial.

[50] A cet effort créateur s’ajoutaient les disciplines humanistes tout comme les sciences naturelles.

[51] Devenir bacalareus artium passait pour une condition nécessaire avant l’inscription pour une étude juridique. La faculté des arts passait pour une pépinière, qui fournissait des étudiants aux autres trois facultés supérieures. Les humanistes combattaient cette structure de l’enseignement supérier et affirmaient l’autonomie des artes liberales. Avec la fondation du Collegium Poetarum et Mathematicorum on a établi à l’Université de Vienne les studia humanitatis, en assurant surtout leur statut autonome par rapport aux autres facultés.

[52] Celtis exprimait cette disponibilité d’une manière persuasive, en promettant ou laissant comprendre plus qu’il accomplissait. Par exemple il n’a pas recherché la généalogie de l’empereur, bien que Maximilien Ier ait attendu un tel service.

[53] H. Rupprich, Der Briefwechsel des Konrad Celtis, lettre no. 275 (Ad divum Maxmylianum, invictissimum et serenissimum Rhomanorum regen et Caesarem Augustum, Conradi Celtis in libros amorum suorum praefatio et panegyrici prima pars), pp. 495 seqq.

[54] Celle-ci concernait la conduite morale du diplômé aussi.

[55] Il s’agit d’un rite de passage indispensable pour la reconnaissance de licentia ubique docendi.

[56] L’étudiant à la faculté des arts de l’Université de Oxford devait tenir deux disputes: une comme élève (au vesperie c’est à dire un jour avant la cérémonie proprement-dite), l’autre le lendemain en qualité de magister, qu’il devait gagner (au cours de inceptio proprement-dite). Par les deux disputes on mettait en évidence le caractère de rite de passage de inceptio, voir J. M. Fletscher, The History of European Universities. Work in Progress and Publications, I, s. l., 1977, pp. 388-391.

[57] “[…] Caesarea nostra auctoritate ac motu proprio praefatum collegium hoc praesenti privilegio ac praerogativa decoramus, ut quicumque in praefata nostra universitate Viennensi in oratoria et poetica studerit, laureamque concupiverit, is in praenominato poetarum collegio diligenter examinatus, si idoneus ad id munus suscipiendum habitus et inventus fuerit […]” (ma soulignation), H. Rupprich, Der Briefwechsel des Konrad Celtis, (Privilegium erectionis «Colegii poetarum et mathematicorum» in Vienna) lettre du 31 octobre 1501, p. 459.

[58] Le jeune endormi doit choisir à son réveil entre Discordia et l’option pour une étude humaniste.

[59] Comme je l’ai déjà souligné, il s’agit d’un scenario hypothétique et à supposer par rapport aux cas similaires.

[60] On comprend par là premièrement la connaissance des spécialistes sous son aspect de know-how.

[61] H. Rupprich, op. cit., lettre no. 266, p. 459.

[62] Le verbe birretare, construit de biretta, birretum, est attesté comme synonyme pour “finir des études”, voir Olga Weijers,

 Terminologie des Universités au XIIIe siècle, Rome 1987, (=Lessico intellettuale europeo / Consiglio Nazionale delle Ricerche. Centro di Ricerca, 39), p. 408.